mercredi 22 juillet 2020

lundi 6 juillet 2020

Le soldat inconnu

Il est arrivé pour s'éteindre. Je suis arrivée comme un bouquet de chrysanthèmes. 

Je ne connais pas la couleur de ses yeux, ni le son de sa voix. Par contre, j'ai observé son corps laiteux, jaunâtre et gris. Je l'ai observé mais il ne m'a rien appris, juste le vide d'un corps mort. Une enveloppe peu bavarde pour laquelle  j'ai effectué le dernier bain, enfilé la dernière chemise, celle d'un hôpital pour un dernier transfert. 

Je l'ai observé et j'ai attendu. Je l'ai sondé et rien n'est venu.

La mort fait partie de mon travail. Je la côtoie chaque jour. 
Mais la mort brute, nette, radicale, sans histoire à mes oreilles pour l'amadouer, celle-ci s'applique à être affreuse. Elle n'a aucun écho, elle ne répond à rien. Je ne peux pas me raccrocher aux branches de sa vie. A mes yeux, je ne suis qu'une exécutante, un aller simple sans baluchon sur ma propre épaule.

J'ai un soupçon de prétention à penser que mon empathie guide les dernières volutes de l'Homme que j'accompagne.

Alors, lui, est-il tout aussi bien préparé pour le dernier voyage qu'un patient dont l'histoire m'est familière ?

Note : la photo qui illustre ce post est la photo du soldat inconnu :
30 000 portraits ont servi à donner un visage au Soldat inconnu qui repose sous l'Arc de Triomphe, à Paris.
Crédit Image : Historial de la Grande guerre de Péronne.

L'éthique de l'écriture